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L’ANCIEN RÉGIME


moderne. Ne pensez pas qu’il soit sans occupations : il s’est fait dresser dans le salon un métier à tapisserie, auquel il travaillait, je ne puis dire avec la plus grande adresse, du moins avec la plus grande assiduité… Maintenant, c’est un cerf-volant qui fait notre bonheur ; le grand-papa ne connaissait pas ce spectacle, il en est ravi ». — En lui-même, un passe-temps n’est rien ; selon l’occasion ou le goût du moment, on le prend, on le laisse, et bientôt l’abbé écrit : Je ne vous parle plus de nos chasses parce que nous ne chassons plus, ni de nos lectures parce qu’on ne lit plus, ni de nos promenades parce que nous ne sortons point. Que faisons-nous donc ? Les uns jouent au billard, d’autres aux dominos, d’autres au trou-madame. Nous défilons, effilons, parfilons. Le temps nous pousse et nous le lui rendons bien ».

Même spectacle dans les autres compagnies. Toute occupation étant un jeu, il suffit d’un caprice, d’un souffle de la mode pour en mettre une en honneur. À présent, c’est le parfilage, et, à Paris, dans les châteaux, toutes les mains blanches défont les galons, les épaulettes, les vieilles étoffes, pour en retirer les fils d’or et d’argent. Elles trouvent à cela un semblant d’économie, une apparence d’occupation, en tout cas une contenance. À peine un cercle de femmes est-il formé, qu’on pose sur la table un gros sac à parfiler en taffetas vert ; c’est celui de la maîtresse du logis ; toutes les dames aussitôt demandent leurs sacs « et voilà les laquais en l’air[1] ».

  1. Mme de Genlis, Dictionnaire des Étiquettes, II, 38. — George