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LE DÉFAUT ET LES EFFETS DU SYSTÈME


ou qui devraient l’être, c’est-à-dire à 2 470 000 personnes[1], mais encore à d’autres, par centaines de mille, que le conseil municipal juge incapables de payer. — Même quand les gens ont un petit bien foncier, on les dispense aussi de la contribution foncière et des centimes additionnels très nombreux qui la grossissent : c’est le cas, s’ils sont peu valides ou chargés de famille. Le fisc, pour ne pas faire d’eux des mendiants et des vagabonds, évite de les exproprier, de mettre en vente leur chaumière en pisé, leur jardinet alimentaire, leur carré de pommes de terre ou de choux ; il leur donne quittance gratis, ou du moins il s’abstient de les poursuivre[2]. De cette façon, quoique propriétaire, le paysan pauvre s’exempte encore ou est exempté de sa dette locale. À vrai dire, il n’en acquitte rien ou presque rien, sinon par ses prestations en argent ou en nature, c’est-à-dire par trois journées de travail sur les chemins vicinaux, lesquelles, s’il les fournit en nature, ne valent que 50 sous[3]. Ajoutez-y sa part, si petite et souvent nulle, dans les centimes additionnels de la contribution des portes et fenêtres, de la contribution

  1. A. de Foville, la France économique (1887), 59 : « Nos 14 500 bureaux de bienfaisance ont secouru, en 1883, 1 405 500 personnes… Comme, en réalité, la population des communes desservies (par eux) n’est que de 22 millions d’habitants, la proportion des inscrits s’élève à 6,5 pour 100. »
  2. Paul Leroy-Beaulieu, Essai sur la répartition des richesses, 174 et suivantes. — En 1851. on évaluait à 7 800 000 le nombre des propriétaires en France ; sur ces 7 800 000, 3 millions étaient dispensés de l’impôt foncier comme indigents, et leurs cotes étaient considérées comme irrécouvrables.
  3. Paul-Leroy-Beaulieu, Traité de la science des finances, 721.