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LE RÉGIME MODERNE


les institutions qui naissent spontanément sur place ; elles s’adaptent aux circonstances, elles se proportionnent aux besoins, elles utilisent les ressources et donnent le maximum de rendement avec le minimum de frais.

Tout ce grand établissement a péri, corps et biens, comme un navire qui sombre : les maîtres ont été destitués, bannis, déportés et proscrits ; les propriétés ont été confisquées, vendues, anéanties, et ce qu’il en reste aux mains de l’État n’a pas été restitué pour être appliqué de nouveau à l’ancien service : plus maltraité que l’assistance publique, l’enseignement public n’a recouvré aucun débris de sa dotation. Partant, dans les derniers temps du Directoire et même dans les premiers temps du Consulat[1], l’enseignement est presque nul en France ; en fait, depuis huit ou neuf ans, il a cessé[2], ou il est

  1. Statistiques des préfets, Indre, par Dalphonse, an XII, 104 : « Les universités, les collèges, les séminaires, les maisons religieuses, les écoles gratuites, tout a été détruit, et, sur ces décombres, on a élevé de vastes plans d’instruction nouvelle. Presque tous sont restés sans exécution… Nulle part, pour ainsi dire, les écoles primaires n’ont été instituées, et celles qui l’ont été l’ont été si mal, qu’il vaudrait presque autant qu’elles n’eussent pas été. Avec un pompeux et dispendieux système d’instruction publique, dix années ont été perdues pour l’instruction. »
  2. Moniteur, XXI, 644 (Séance du 13 fructidor an II). Un membre : « Il est bien certain, et mes collègues le voient avec douleur, que l’instruction publique est nulle. » — Fourcroy : « On n’apprend plus à lire et à écrire. » — Albert Duruy, 208 (Rapport au Directoire exécutif, 13 germinal an IV) : « Depuis près de six ans, il n’existe plus d’instruction publique. » — M. de la Sicotière, Histoire du collège d’Alençon, 33 : « En 1794, il ne restait plus que deux élèves au collège. » — Lunet. Histoire du collège de Rodez, 157 : « Les salles de classes restèrent vides de maîtres et d’élèves depuis mars 1793 jusqu’au 16 mai 1796. » — Statis-