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LE RÉGIME MODERNE


et le maire ; partout où il a résidé, il a su les amadouer ; en conséquence, « on le fait passer de paroisse en paroisse[1], on le choisit exprès pour le mettre dans celles où il y a des maires difficiles, chicaniers, méchants, impies ». C’est pour le bien du service et dans l’intérêt de l’Église. À cet intérêt supérieur, l’évêque subordonne les personnes. La législation de 1801 et de 1802 lui a conféré de pleins pouvoirs, et il les exerce ; parmi tant de prises qu’il a obtenues sur son clergé, l’amovibilité est la plus forte, et il en use. Dans toutes les institutions civiles ou ecclésiastiques. Napoléon, directement ou par contre-coup, a mis son esprit, l’esprit militaire ; de là le régime autoritaire, encore mieux établi dans l’Église que dans l’État, parce qu’il est dans l’essence de l’institution catholique ; bien loin, de s’y détendre, il y est devenu plus strict ; à présent, il y est avoué[2], proclamé, et même canonique ; de nos

  1. Manrèze du prêtre, par le R. P. Caussette, vicaire général de Toulouse, 1879, t. II, 523 (Paroles d’un missionnaire expérimenté, l’abbé Dubois ; il ajoute que ces prêtres, transférés en des postes difficiles, sont toujours bien avec leurs maires,… triomphent des obstacles et maintiennent la paix). — Ib., I, 312 : « Je ne sais si la conscience informée de nos seigneurs les évêques a commis quelques erreurs ; mais combien de grâces n’a-t-elle pas accordées ! combien de scandales n’a-t-elle pas étouffés ! combien de réputations n’a-t-elle pas conservées ! — Malheur à vous si vous avez affaire à un tribunal, non à un père ! car un tribunal acquitte, il ne pardonne pas… Et votre évêque peut user non seulement de la miséricorde du pardon, mais encore de celle du secret. Combien recueillent les bénéfices de cet ordre paternel en le calomniant ! »
  2. Vie de Mgr Dupanloup, par l’abbé Lagrange, II, 45 : « Mgr Dupanloup croyait l’amovibilité pastorale très favorable, pour ne pas dire nécessaire, à la bonne administration d’un diocèse, au