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LE RÉGIME MODERNE


quels sont tous institués par le pape, celui-ci monarque absolu, et déclaré tel par le dernier concile. Par degrés, dans la Rome nouvelle comme dans la Rome ancienne, l’autorité s’est concentrée jusqu’à se rassembler et se déposer tout entière aux mains d’un seul homme. À Romulus, le pâtre albain, avait succédé le César Auguste, Constantin ou Théodose, dont le titre officiel était « votre éternité », « votre divinité », et qui appelait leurs décrets « des oracles immuables ». À Pierre, le pêcheur de Galilée, ont succédé les souverains pontifes infaillibles, dont le titre officiel est « votre sainteté », et dont les décrets sont pour tout catholique « des oracles immuables », en fait aussi bien qu’en droit, non par hyperbole, mais avec toute la plénitude du sens exprimé par l’exactitude des mots. Ainsi l’institution impériale s’est reformée ; elle n’a fait que se transporter d’un domaine dans un autre ; seulement, en passant de l’ordre temporel à l’ordre spirituel, elle est devenue plus solide et plus forte ; car elle a paré aux deux défauts qui affaiblissaient son modèle antique. — D’une part, elle a pourvu à la transmission du pouvoir suprême ; dans la vieille Rome, on n’avait pas su la régler ; de là, en cas de vacance, tant de compétitions violentes, et tous les conflits, toutes les brutalités, toutes les usurpations de la force, toutes les calamités de l’anarchie. Dans la Rome catholique, l’élection du souverain pontife appartient définitivement à un collège de prélats, qui votent selon des formes établies ; à la majorité des deux tiers ; ils nomment le nouveau pape, et, depuis plus de quatre