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LE RÉGIME MODERNE


tantes ; en chaque État, ces difficultés varient avec le caractère de l’État et avec la forme que l’Église catholique y a reçue. En France, depuis le Concordat, elles sont plus graves qu’ailleurs.

En effet, quand, à l’origine, en 1802, elle reçut sa forme française, ce fut dans un ensemble et dans un système, en vertu d’un plan général et régulier, d’après lequel elle ne fut qu’un compartiment dans un cadre. Par son Concordat, par ses Articles organiques et par ses décrets ultérieurs, Napoléon, conformément aux idées du siècle et aux principes de l’Assemblée constituante, voulut faire de tout clergé, et notamment du clergé catholique, une subdivision de son personnel administratif, un corps de fonctionnaires, simples agents préposés aux choses religieuses, comme d’autres aux choses civiles, partant maniables et révocables ; de fait et sous sa main, tous l’étaient, y compris les évêques, puisque, sur son ordre, ils donnaient à l’instant leur démission. Aujourd’hui encore, sauf les évêques, tous le sont, ayant perdu la propriété de leurs places et l’indépendance de leurs vies, par le maintien des institutions consulaires et impériales, par l’amovibilité, par l’anéantissement des garanties canoniques et civiles qui protégeaient autrefois le bas clergé, par l’effacement de l’officialité, par la réduction des chapitres à l’état d’ombres vaines, par la rupture ou le relâchement du lien local et moral qui jadis attachait tout membre du clergé à un domaine foncier, à un corps organisé, à un territoire, à un troupeau, par le manque de toute dotation ecclé-