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LE RÉGIME MODERNE


Enfin, la discipline de l’école fait son effet ; quel que soit le régime de la maison, libéral ou autoritaire, lâche ou strict, monacal, militaire ou mondain, externat ou internat mixte ou pur, à la ville ou à la campagne, avec prédominance de l’entraînement gymnastique ou du travail cérébral, avec application de l’esprit à l’étude des choses ou à l’étude des mots, l’élève entre dans un cadre fabriqué d’avance. Selon les diversités du cadre, il pratique des exercices différents, il contracte des habitudes différentes, il se développe ou se rabougrit au physique ou au moral, dans un sens ou dans le sens contraire. Partant, selon que le cadre est bon ou mauvais, il devient plus ou moins capable ou incapable d’effort corporel ou mental, de réflexion, d’invention, d’initiative, d’entreprise, de subordination à un but, d’association volontaire et persistante, c’est-à-dire, en somme, d’un rôle actif et utile sur le théâtre où il va monter. — Notez que cet apprentissage en commun, sur des bancs, d’après un règlement et sous un maître, dure six, dix, quinze ans et parfois vingt, que les filles n’en sont pas exemptes, que pas un garçon sur cent n’est élevé jusqu’au bout chez lui par un précepteur à domicile, que, dans l’enseignement secondaire et même dans l’enseignement supérieur, la roue scolaire tourne uniformément et sans arrêt dix heures par jour si l’élève est externe, et vingt-quatre heures par jour si l’élève est interne, qu’à cet âge l’argile humaine est molle, qu’elle n’a pas encore pris son pli, que nulle forme acquise et résistante ne la défend contre la main du