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L’ÉCOLE


manière des commençants. — Pour un enseignement si réduit, les meilleurs maîtres seraient les Frères des Écoles chrétiennes, et, contre l’avis de ses conseillers, Napoléon les soutient : « Si on les oblige, dit-il[1], à s’interdire par leur vœu toute autre connaissance que la lecture, l’écriture et les éléments du calcul,… c’est pour les rendre plus propres à leur destination. » — En les comprenant dans l’Université, on les rattachera à l’ordre civil et l’on préviendra le danger de leur indépendance. » Désormais « ils n’ont plus pour chef un étranger ou un inconnu ». « Le supérieur général de Rome a renoncé à toute inspection sur eux ; il est convenu qu’ils auront en France un supérieur général qui résidera à Lyon[2]. » Celui-ci, avec tous ses religieux, tombe sous la main du gouvernement et sous l’autorité du Grand Maître. Une telle corporation, quand on en tient la tête, est un parfait instrument, le plus sûr, le plus exact, sur lequel on peut toujours compter et qui jamais n’opère à côté ou au delà de la limite tracée. Rien de plus commode pour Napoléon, qui, dans l’ordre civil, veut être un pape, qui fonde son État, comme le pape son Église, sur la vieille tradition romaine, qui, pour gouverner d’en haut, s’allie à l’autorité ecclésiastique, qui, comme l’autorité catholique, a besoin d’exécutants disciplinés,

  1. Pelet de la Lozère, 175 (Paroles de Napoléon au Conseil d’État, 21 mai 1806).
  2. Alexis Chevalier, les Frères des Écoles chrétiennes pendant la Révolution, 93 (Rapport de Portalis approuvé par le Premier Consul, 10 frimaire an XII).