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LA PROPAGATION DE LA DOCTRINE


dire que « la répartition de l’impôt doit être un partage fraternel des charges publiques ». En 1780, les abbés, prieurs et chapitres de la même province offrent 60 000 livres de leur argent, et quelques gentilshommes, en moins de vingt-quatre heures, 17 000 livres. En 1787, dans l’assemblée d’Alençon, la noblesse et le clergé se cotisent de 30 000 livres pour soulager d’autant les taillables indigents de chaque paroisse[1]. Au mois d’avril 1787, le roi, dans l’Assemblée des Notables, parle de « l’empressement avec lequel les archevêques et évêques ont déclaré ne prétendre à aucune exemption pour leur contribution aux charges publiques ». Au mois de mars 1789, dès l’ouverture des assemblées de bailliage, le clergé tout entier, la noblesse presque tout entière, bref le corps des privilégiés, renonce spontanément à ses privilèges en fait d’impôt. Le sacrifice est voté par acclamation ; ils viennent d’eux-mêmes l’offrir au Tiers-état et il faut voir dans les procès-verbaux manuscrits leur accent généreux et sympathique. « L’ordre de la noblesse du bailliage de Tours, dit le marquis de Lusignan[2], considérant que ses membres sont hommes et citoyens avant que d’être nobles, ne peut

  1. Procès-verbaux de l’assemblée provinciale de Normandie, généralité d’Alençon, 252. — Cf. Archives nationales, H, 1149 : en 1778, dans la généralité de Moulins, trente-neuf personnes, la plupart nobles, ajoutent de leur argent 18 950 livres aux 60 000 allouées par le roi pour les routes et ateliers de charité.
  2. Archives nationales, procès-verbaux et cahiers des États généraux, t. XLIX, 712, 714 (noblesse et clergé de Dijon). T. XVI, 183 (noblesse d’Auxerre). T. XXIX, 352, 455, 458 (clergé et noblesse du Berry. T. CL, 266 (clergé et noblesse de Tours). T. XXIX, clergé et noblesse de Châteauroux (29 janvier 1789), 572 à 582.