Aller au contenu

Page:Taine - Les Origines de la France contemporaine, t. 2, 1910.djvu/256

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
238
L’ANCIEN RÉGIME


Poitou, l’Auvergne, le Lyonnais, la Gascogne et la Haute-Guyenne, bref les principaux pays d’élections, on trouvera que, sur 100 francs de revenu net, l’impôt direct prenait au taillable[1] 53 francs, plus de la moitié. C’est à peu près cinq fois autant qu’aujourd’hui.

III

Mais le fisc, en s’abattant sur la propriété taillable, n’a pas lâché le taillable qui est sans propriété. À défaut de la terre, il saisit l’homme. À défaut du revenu, on taxe le salaire. Sauf les vingtièmes, tous les impôts précédents atteignent non seulement celui qui possède, mais encore celui qui ne possède pas. En Toulousain[2], à Saint-Pierre de Bajourville, le moindre journalier, n’ayant que ses bras pour vivre et gagnant dix sous par jour, paye huit, neuf, dix livres de capitation. « En Bourgogne[3], il est ordinaire de voir un malheureux manœuvre, sans aucune possession, imposé à dix-huit ou vingt livres de capitation et de taille. » En Limousin[4], tout l’argent que les maçons rapportent en hiver sert à « payer les impositions de leur famille ». Quant aux journaliers de campagne et aux colons, le proprié-

  1. Voir la note 1 à la fin du volume.
  2. Théron de Montaugé, 109 (1763). À cette époque le salaire est de 7 à 12 sous par jour en été.
  3. Archives nationales. Procès-verbaux et cahiers des États Généraux, t. 59, 6. Mémoire à M. Necker par M. d’Orgeux, conseiller honoraire au Parlement de Bourgogne, 25 octobre 1788.
  4. Ibid., H, 1418. Lettre de l’intendant de Limoges du 26 février 1784.