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L’ANARCHIE SPONTANÉE


Roi veulent que nous soyons heureux : si nous les aidions ! Déjà on dit que le roi nous a déchargés des contributions : si nous nous déchargions des redevances ! À bas les seigneurs ! ils ne valent pas mieux que les commis ! » — Dès le 16 juillet, le château de Sancy, à la princesse de Bauffremont, est saccagé, puis, le 18, ceux de Lure de Bithaine et de Molans[1]. Le 29, dans une fête populaire chez M. de Mesmay, un accident qui survient parmi les pièces d’artifice persuade aux gens du peuple que l’invitation était un piège et qu’on a voulu se défaire d’eux par trahison[2]. Saisis de fureur, ils incendient le château, et, dans la semaine qui suit[3], trois abbayes sont détruites, onze châteaux ruinés, d’autres pillés, « toutes les archives enfoncées, les registres et les terriers enlevés, les dépôts violés ». — Parti de là, « l’ouragan d’insurrection » s’étale sur toute l’Alsace, depuis Huningue jusqu’à Landau[4]. Les révoltés montrent des placards signés Louis, portant que « pendant tel laps de temps il leur est permis de se faire justice à eux-mêmes », et, dans le Sundgau, un tisserand bien vêtu, décoré d’une ceinture bleue, passe pour

  1. Mercure de France, 20 août. (Lettre de Vesoul, 13 août.)
  2. M. de Mesmay prouva plus tard son innocence, et fut réhabilité par sentence publique, après deux ans de procédure (séance du 4 juin 1791, Mercure du 11 juin).
  3. Journal des débats et décrets, I, 258. (Lettre de la municipalité de Vesoul, 22 juillet. — Discours de M. de Toulongeon, 29 juillet.)
  4. Rochambeau, Mémoires, I, 555, — Archives nationales, F7, 3253. (Lettre de M. de Rochambeau, 4 août.) — Chronique de Schmutz (ib.), 284. — Archives nationales, D, XXIX, I. (Lettre de Mme Ferrette, secrète de Remiremont, 9 août.)