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LA RÉVOLUTION


et, si on les met au service d’une idée fausse, ils font d’autant plus de mal qu’ils sont plus grands.

Vers la fin de 1789, on ne peut plus en douter, et les partis qui se sont formés ont donné la mesure de leur présomption, de leur imprévoyance, de leur incapacité et de leur raideur. « Il y en a trois dans l’Assemblée, écrit l’ambassadeur américain[1]. Le premier, celui des aristocrates, comprend le haut clergé, les parlementaires et cette portion des nobles qui voudraient former un ordre à part. » C’est lui qui résiste aux fautes et aux folies, mais par des fautes et des folies presque égales. À l’origine, les prélats, au lieu de se concilier les curés, « les ont tenus à une distance humiliante, affectant des distinctions, exigeant des respects », et, dans leur propre chambre, « se cantonnant sur des bancs séparés ». D’autre part, les nobles, afin de se mieux aliéner les communes, ont débuté par les accuser « de révolte, de trahison, de lèse-majesté », et par réclamer contre elles l’emploi de la force militaire. À présent que le Tiers victorieux les a reconquis et les accable de son nombre, ils redoublent de maladresse et conduisent la défense encore plus mal que l’attaque. « Dans l’Assemblée, dit l’un d’entre eux, ils n’écoutent pas, ils rient, ils parlent haut », ils prennent à tache d’aigrir par leur impertinence leurs adversaires et les galeries[2]. « Ils sortent de la salle, lorsque le président

  1. Morris, 24 janvier 1790.
  2. Marmontel, XII, 265. — Ferrières, I, 48 ; II, 50, 58, 126. — Dumont, 74.