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LA RÉVOLUTION


caisse n’y suffit pas ; qu’ils se cotisent ou qu’ils empruntent sur leur signature, à la municipalité, aux riches de la ville. — Pour plus de garanties en divers endroits, les soldats enlèvent la caisse militaire, montent la garde alentour : elle est à eux, puisqu’ils sont le régiment, et en tout cas elle sera mieux entre leurs mains qu’entre des mains suspectes. — Déjà, le 4 juin 1790, le ministre de la guerre annonce à l’Assemblée « que le corps militaire menace de tomber dans la plus complète anarchie ». Son rapport montre « les prétentions les plus inouïes affichées sans détours, les ordonnances sans force, les chefs sans autorité, la caisse militaire et les drapeaux enlevés, les ordres du roi lui-même bravés hautement, les officiers méprisés, avilis, menacés, chassés, quelques-uns même captifs au milieu de leur propre troupe, y traînant une vie précaire au sein des dégoûts et des humiliations, et, pour comble d’horreur, des commandants égorgés sous les yeux et jusque dans les bras de leurs propres soldats ».

C’est bien pis après la Fédération de Juillet. Régalés, caressés et endoctrinés aux clubs, leurs délégués, bas officiers et soldats, reviennent jacobins au régiment, et désormais correspondent avec les jacobins de Paris, « recevant leurs instructions et leur rendant compte[1] ».

  1. Bouillé, 127. — Moniteur, séance du 7 mai 1790, et séance du 6 août 1790. — Grands détails, par pièces authentiques de l’affaire de Nancy, passim. — Rapport de M. Emmery, 16 août 1790, et autres pièces dans Buchez et Roux, VII, 59-162. — Bezancenet,