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LA CONSTITUTION APPLIQUÉE


s’en vont à la fin de la Constituante, parce qu’ils sont « en danger d’être pendus ». Un grand nombre donnent leur démission à la fin de 1791 et dans les premiers mois de 1792, à mesure que le nouveau code et le nouveau recrutement de l’armée développent leurs conséquences[1]. En effet, d’un côté, les soldats et les sous-officiers ayant une part dans l’élection de leurs chefs et un siège dans les tribunaux militaires, « l’ombre de la discipline n’existe plus ; le pur caprice prononce dans les jugements ; le soldat contracte l’habitude de dédaigner ses supérieurs dont il ne craint aucune peine et dont il n’attend aucune récompense ; les officiers sont paralysés au point d’être des personnages entièrement superflus ». — D’un autre côté, la majorité des volontaires nationaux se compose « d’hommes achetés par les communes » et par les

    sonne du Roi un sentiment difficile à définir… (C’était) un sentiment de dévouement avec un caractère presque religieux, un respect inné, comme dû à un être d’ordre supérieur. Le mot de Roi avait alors une magie et une puissance que rien n’avait altéré dans les cœurs droits et purs. Cette fleur de sensation… existait encore dans la masse de la nation, surtout parmi les gens bien nés qui, placés à une assez grande distance du pouvoir, étaient plutôt frappés de son éclat que de ses imperfections. » — Bezancenet, 27. Lettre de M. de Dommartin, 24 août 1790. « Nous venons de renouveler notre serment ; je ne sais trop ce que cela signifie ; moi, militaire, je ne connaissais que mon Roi ; actuellement j’obéis à deux maîtres qui doivent, nous dit-on, faire mon bonheur et celui de mes frères, s’ils sont d’accord. »

  1. Dampmartin, I, 179. Voir le détail de sa démission (III, 185), après le 20 juin 1792. — Mercure de France, 14 avril 1792. Lettre des officiers du bataillon des chasseurs royaux de Provence (9 mars). Ils ont été consignés par leurs soldats qui leur ont refusé toute obéissance, et déclarent que c’est à cause de cela qu’ils quittent le service et la France.