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LA CONSTITUTION APPLIQUÉE


dans la même ville, le maire Simoneau, ayant refusé de taxer le blé, est assommé à coups de bâtons ferrés, et la bande des meurtriers vient décharger ses fusils sur le cadavre. — Avis aux municipalités qui se mettront en travers du torrent : bientôt, à la moindre opposition, il y va pour elles de la vie. En Touraine[1], « à mesure que les rôles d’imposition se publient », on se soulève contre les municipalités, on les force à livrer les rôles qu’elles ont dressés, on déchire leurs écritures. Bien mieux, « on tue, on assassine les municipaux » ; dans telle grosse commune, hommes et femmes les « excèdent de coups de pieds, de poings et de sabots… Le maire en est très malade ; le procureur de la commune en est mort sur les neuf à dix heures du matin ; Véteau, officier municipal, a reçu l’extrême-onction ce matin » ; les autres sont en fuite, les menaces de mort et d’incendie ne cessent pas contre eux. Aussi n’osent-ils rentrer, et « c’est à qui maintenant ne sera ni maire ni administrateur ». — Ainsi, tous les attentats que les municipalités commettent contre leurs supérieurs, on les commet contre elles, et la garde nationale, le peuple attroupé, la faction maîtresse, s’arrogent dans la commune la même souveraineté violente que la commune s’arroge dans l’État.

Je ne finirais pas si j’entreprenais d’énumérer les

  1. Archives nationales, F7, 3226. Lettre et Mémoire de Chenantin, cultivateur, 7 novembre 1792. — Extrait des délibérations du directoire du district de Langeais, 5 novembre 1792 (sédition à la Chapelle-Blanche, près Langeais, 5 octobre 1792).