Aller au contenu

Page:Taine - Les Origines de la France contemporaine, t. 5, 1904.djvu/25

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
21
LES JACOBINS


pour prendre son billet « dans cette immense loterie de fortunes populaires ; d’avancements sans titres, de succès sans talents, d’apothéoses sans vertus, d’emplois infinis distribués par le peuple en masse et reçus par le peuple en détail ». — Tous les charlatans politiques y sont accourus, au premier rang ceux qui, étant sincères, croient à la vertu de leur drogue, et ont besoin du pouvoir pour imposer leur recette au public. Puisqu’ils sont des sauveurs, toutes les places leur sont dues, et notamment les plus hautes. Par conscience et philanthropie, ils les assiègent ; au besoin, ils les prendront d’assaut, ils les garderont de force, et, de gré ou de force, ils administreront leur panacée au genre humain.

III

Ce sont là nos Jacobins : ils naissent dans la décomposition sociale, ainsi que des champignons dans un terreau qui fermente ; Considérons leur structure intime : ils en ont une, comme autrefois les puritains, et il n’y a qu’à suivre leur dogme à fond, comme une sonde, pour descendre en eux jusqu’à la couche psychologique où l’équilibre normal des facultés et des sentiments s’est renversé.

Lorsqu’un homme d’État qui n’est pas tout à fait indigne de ce grand nom rencontre sur son chemin un principe abstrait, par exemple celui de la souveraineté du peuple, s’il l’admet, c’est comme tout principe, sous bénéfice d’inventaire. À cet effet, il commence par se le