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LES JACOBINS


ciens moines mendiants, colporteurs, aubergistes, détaillants, forts de la Halle[1], ouvriers des villes, depuis Gonchon, l’orateur du faubourg Saint-Antoine, jusqu’à Simon, le savetier du Temple, et Trinchard, le juré du tribunal révolutionnaire, jusqu’aux épiciers, tailleurs, cordonniers, marchands de vin, garçons coiffeurs et autres boutiquiers ou artisans en chambre qui, de leurs propres mains, travailleront aux massacres de septembre. Ajoutez-y la queue fangeuse de toute insurrection ou dictature populaire, les bêtes de proie, comme Jourdan d’Avignon et Fournier l’Américain, les femmes qui, comme Théroigne, Rose Lacombe et les tricoteuses de la Convention, se sont dépouillées de Leur sexe, les bandits amnistiés, et tout ce gibier de police à qui le manque de police laisse les coudées franches, les traîneurs de rue, tant de vagabonds rebelles à la subordination et au travail, qui, au milieu de la civilisation, gardent les instincts de la vie sauvage, et allèguent la souveraineté du peuple pour assouvir leurs appétits natifs de licence, de paresse et de férocité. — Ainsi se recrute le parti, par un racolage qui glane des sujets dans tous les états,

    riot. — Campardon, Histoire du Tribunal révolutionnaire de Paris, I, 306. Lettre de Trinchard : « Si tu n’est pas toute seulle et que le compagnion soit a travailler tu peus ma chaire amie venir voir juger 24 mesieurs tous si devent président ou conselier au parlement de Paris et de Toulouse. Je t’ainvite a prendre quelque choge aven de venir parcheque nous naurons pas fini de 3 hurres. Je t’embrase ma chaire aamie et épouge. » — Ibid., II, 550, interrogatoire d’André Chénier. — Histoire du Tribunal révolutionnaire, I, 316. Lettre de Simon : « Je te coitte le bonjour mois est mon est pousse. »

  1. Ils se faisaient appeler « les forts pour la patrie ».