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LA RÉVOLUTION


sentant du peuple en mission n’aura pour lui que quatre cents hommes[1]. Comptez-en une cinquantaine dans chaque petite ville, quinze ou vingt dans chaque gros bourg, cinq ou six dans chaque village : en moyenne, sur quinze électeurs et gardes nationaux, il ne se rencontre qu’un Jacobin, et, dans toute la France, tous les Jacobins réunis ne sont pas trois cent mille[2]. — Ce n’est guère pour asservir six à sept millions d’hommes faits, et pour étendre sur un pays qui comprend vingt-six millions d’habitants un despotisme plus absolu que celui des souverains asiatiques. Mais la force ne se mesure pas au nombre : ils sont une bande dans une foule, et, dans une foule désorganisée, inerte, une bande décidée à tout perce en avant comme un coin de fer dans un amas de plâtras disjoints.

C’est que contre l’usurpation au dedans, comme au dehors contre la conquête, une nation ne peut se défendre que par son gouvernement. Il est l’instrument indispen-

    de partisans de Henriot ont voté deux fois. (Cf., sur les élections et le membre des Jacobins à Paris, le tome VI, livre III, chapitres iii et iv.)

  1. Michelet, VI. 95 : « Presque tous (les représentants en mission) n’étaient appuyés que d’une minorité infime. Baudot, par exemple, à Toulouse, en juin 1793, n’avait pas quatre cents hommes pour lui. »
  2. Par exemple Archives nationales, F1 6, carton 3. Pétition des habitants d’Arnay-le-Duc au roi (avril 1792) très injurieuse ; ils le tutoient. Environ cinquante signatures. — Sauzay, III, ch. xxxiii et xxxv. Détails sur les élections locales. — Ib. VII, 687. Lettre de Grégoire, 24 décembre 1796. — Malouet, II, 531. Lettre de Malouet, 25 juillet 1799. — Malouet et Grégoire sont d’accord sur le chiffre de 300 000. Marie-Joseph Chénier (Moniteur, XII, 695, 20 avril 1792) le porte à 400 000.