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LA SECONDE ÉTAPE DE LA CONQUÊTE


« à tous les excès et à toutes sortes d’horreurs contre ceux qu’ils soupçonnent d’incivisme sous prétexte des opinions religieuses[1] ». Si rempli et si offusqué que soit l’esprit de Roland par les généralités philosophiques, il a longtemps inspecté dans ce pays les manufactures ; tous les noms de lieux lui sont familiers ; cette fois les objets et les formes se dessinent dans son imagination desséchée, et il commence à voir les choses à travers les mots.

Le doigt de Mme Roland se pose sur ce Lyon qu’elle connaît si bien. Deux ans auparavant, elle s’indignait contre « la quadruple aristocratie de la ville, petits nobles, prêtres, gros marchands et robins, bref ce qu’on appelait les honnêtes gens dans l’insolence de l’ancien régime[2] » ; à présent, elle y trouve une autre aristocratie, celle du ruisseau. À l’exemple de Paris, les clubistes de Lyon, conduits par Châlier, ont préparé le

  1. Archives nationales, F7, 3255. Lettre des administrateurs du district de Roanne, 18 août. Quatorze volontaires du canton de Néronde se portent à Chenevoux, maison appartenant à M. Dulieu, qu’on présume émigré. Ils exigent du gardien du séquestre de la maison 200 francs sous peine de mort, et celui-ci les donne. — Lettre des mêmes, 11 septembre : « Les moyens de répression deviennent nuls tous les jours. Les juges de paix, à qui on dénonce les délits, n’osent informer et juger des citoyens qui se font craindre. Les témoins n’osent déposer, de peur d’être maltraités ou pillés par les malfaiteurs. » — Lettre des mêmes, 22 août. — Procès-verbal de la municipalité de Charlieu, 9 septembre, sur la destruction des terriers : « À quoi nous leur avons représenté que, n’ayant pas la force en main pour nous y opposer, puisqu’ils étaient eux-mêmes la force, nous nous retirions. » — Lettre de l’officier de gendarmerie, 9 septembre, etc.
  2. Lettres autographes de Mme Roland, publiées par Mme Bancal des Issarts, 5 (2 juin 1790).