épuratoire et surajouté, le nouveau conseil de la Commune entreprend l’expulsion de ses membres tièdes, et le maire élu des modérés, Le Fèvre d’Ormesson, est assailli de tant de menaces qu’au moment d’être installé il se démet. À Lyon[1], un autre modéré, Nivière-Chol, élu deux fois et par près de 9000 votants sur 11 000, est contraint deux fois d’abandonner sa place ; après lui, le médecin Gilibert, qui, porté par les mêmes voix, allait aussi réunir la majorité des suffrages, est saisi tout d’un coup et jeté en prison ; même en prison, il est élu ; les clubistes l’y maintiennent d’autant plus étroitement et ne le lâchent pas, même après qu’ils lui ont extorqué sa démission. — Ailleurs, dans les cantons ruraux, en Franche-Comté par exemple[2], quantité d’élections sont cassées si l’élu est catholique. Souvent la minorité jacobine fait scission, s’assemble à part au cabaret, élit son maire ou son juge de paix, et c’est son élu qui est validé comme patriote ; tant pis pour celui de la majorité : les suffrages bien plus nombreux qui l’ont choisi sont nuls, parce qu’ils sont « fanatiques ». — Interrogé de cette façon, le suffrage universel ne peut manquer de faire la réponse qu’on lui dicte. À quel point cette réponse est forcée et faussée, quelle distance sépare les choix officiels et l’opinion publique, comment les élections traduisent à rebours le sentiment
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LA RÉVOLUTION