Page:Taine - Les Origines de la France contemporaine, t. 6, 1904.djvu/232

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
230
LA RÉVOLUTION


le tumulte, il est utile d’en faire ; cela montre à la Convention son maître, et cela prépare les voies pour une invasion plus efficace. Le jour où Marat a été absous, toute sa « crapaudière », mâle et femelle, est venue avec lui ; sous prétexte de défiler devant la Convention, elle a envahi la salle, elle s’est répandue sur les gradins, et, soutenue par les galeries, au milieu d’une tempête d’applaudissements et de clameurs, elle a installé de nouveau à la tribune le promoteur attitré de l’insurrection, du pillage et de l’assassinat[1]. — Pourtant, si énergique et si persistante que soit l’obsession, la Convention, qui cède sur tant de points, ne consent pas à se mutiler elle-même. Elle déclare calomnieuse la pétition présentée contre les Vingt-Deux ; elle institue une commission extraordinaire de douze membres pour rechercher dans les papiers de la Commune et des sections les preuves légales de la conspiration permanente que les Jacobins trament à ciel ouvert contre la représentation nationale ; le maire Pache est mandé à la barre ; des mandats d’arrêt sont lancés contre Hébert, Dobsent et Varlet. — Puisque les manifestations de la volonté populaire n’ont pas suffi et que la Convention, au lieu d’obéir, se rebelle, il ne reste plus à employer que la force.

« Depuis le 10 mars, dit Vergniaud à la tribune[2], on ne cesse de provoquer publiquement au meurtre contre vous. » — « Ce moment est terrible, » écrit le 12 mai

  1. Buchez et lieux, XXVI, 143.
  2. Ib., XXVII, 175, 23 mai.