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LA SECONDE ÉTAPE DE LA CONQUÊTE


tout bas le motif de leur silence : s’ils déposent, « ils sont sûrs d’être assassinés aussitôt que la troupe sera partie ». Le directeur du jury est lui-même menacé et, après trois quarts d’heure de séjour, trouve prudent de quitter la ville. » — Là-dessus, les clubs du Beausset et des environs, enhardis par l’impuissance de la loi, éclatent en motions incendiaires : « On y annonce qu’après la retraite des troupes dix-neuf autres maisons seront dévastées » ; on propose « de couper la tête aux aristocrates, c’est-à-dire à tous les propriétaires de la contrée ». Beaucoup ont fui, mais on ne se contente pas de leur fuite. Vidal enjoint à ceux du Beausset qui se sont réfugiés à Toulon de revenir à l’instant ; sinon on démolira leurs maisons, et de fait, le jour même, en manière d’avertissement, plusieurs maisons du Beausset, entre autres celle d’un notaire, sont démolies ou pillées de fond en comble ; toute la canaille de la ville est à l’œuvre, « hommes et femmes à demi ivres », et, comme il s’agit de voler et de boire, ils ne demandent qu’à recommencer au chef-lieu. — Aussi bien le club a déclaré « que l’on ferait bientôt à Toulon une Saint-Barthélemy nouvelle » ; on y a des alliés, on se concerte avec eux : chaque club des petites villes voisines fournira ses hommes ; tous marcheront sous la direction du club de Toulon. À Toulon comme au Beausset, la municipalité laissera faire, et l’on appliquera à l’accusateur public, aux administrateurs du district et du département les procédés dont ils se plaignent. Libre à eux d’écrire à Paris et de dénoncer les patriotes