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LA SECONDE ÉTAPE DE LA CONQUÊTE


des officiers municipaux et le greffier, qui faisaient patrouille, ont été presque assommés à coups de bâton et de pierres ; le 10 octobre, un autre officier municipal a été laissé pour mort ; quinze jours auparavant, un lieutenant des volontaires, M. Mazières, « ayant voulu faire son devoir, a été assassiné dans son lit par ses propres hommes ». — Naturellement, personne n’ose plus souffler mot, et, après deux mois de ce régime, il est à présumer qu’aux élections municipales du 21 octobre les électeurs seront dociles. En tout cas, par précaution, on se dispense de les prévenir, selon la loi, huit jours d’avance ; par un surcroît de précaution, on leur fait savoir que, s’ils ne votent pas pour le pouvoir exécutif, ils auront affaire au bâton triangulaire[1]. — En conséquence, la plupart s’abstiennent : dans une ville qui compte plus de six cents citoyens actifs, quarante voix donnent la majorité ; Bourgougnon et Sarrus, les deux chefs du pouvoir exécutif, sont élus l’un maire, l’autre procureur-syndic, et désormais l’autorité qu’ils avaient prise par la force leur est conférée par la loi.

IV

Tel est à peu près le type du gouvernement qui surgit, après le 10 août, dans chaque commune de France : le club règne ; mais, selon les circonstances, la forme et les procédés de sa dictature sont différents. — Tantôt il

  1. Dépositions de Moursol, cardeur de laine, de Louis Grand, administrateur du district, etc.