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LE GOUVERNEMENT RÉVOLUTIONNAIRE


« taire que nous avons établie à la place du Tribunal révolutionnaire, écrit-il lui-même, va un train épouvantable contre les conspirateurs… Ils tombent comme la grêle, sous le glaive de la loi. Quatorze ont déjà payé de leurs têtes leurs infâmes trahisons. Demain, seize doivent être guillotinés, presque tous chefs de légion, notaires, sectionnaires, membres du tribunal populaire ; demain, trois négociants dansent aussi la carmagnole ; c’est à eux que nous nous attachons[1]. » Hommes et choses, il faut que tout périsse : il veut démolir la ville et propose de combler le port. Retenu à grand’peine, il se contente de détruire « les repaires de l’aristocratie », deux églises, la salle des concerts, les maisons environnantes, et vingt-trois édifices où les sections rebelles avaient siégé.

À Lyon, pour accroître le butin, les représentants, par des promesses vagues, ont pris soin de rassurer d’abord les industriels et les négociants : ceux-ci ont rouvert leurs magasins ; les marchandises précieuses, les livres de recette, les portefeuilles ont été tirés de leurs cachettes. Incontinent la proie étalée est saisie ; on dresse « le tableau de toutes les propriétés appartenant aux riches et aux contre-révolutionnaires » ; on les « confisque au profit des patriotes de la ville » ; on impose en sus une taxe de 6 millions, payable dans la

  1. Mémoires de Fréron (collection Barrière et Berville). Lettres de Fréron à Moyse Bayle, 23 brumaire, 16 et 19 nivôse, 5 et 14 pluviôse, et détails donnés par Isnard, 350 à 365. — Archives nationales, AF, II, 144 (Arrêté des représentants Fréron, Barras, Ricord et Saliceti, 17 nivôse an II).