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LE GOUVERNEMENT RÉVOLUTIONNAIRE


« secondaires, qui sont les points d’appui de la Révolution, ne servent qu’à l’entraver ; » les décrets, transmis par la filière administrative, n’arrivent que tardivement et ne sont appliqués qu’avec mollesse. « Il vous manque cette force coactive qui est le principe de l’existence, du mouvement et de l’exécution… Tout bon gouvernement doit avoir un centre de volonté et des leviers qui s’y rattachent… Il faut que toutes les émanations de la force publique soient exclusivement puisées à la source. » — « Dans le gouvernement ordinaire, dit enfin Couthon[1], au peuple appartient le droit d’élire ; vous ne pouvez l’en priver. Dans le gouvernement extraordinaire, c’est de la centralité que doivent partir toutes les impulsions, c’est de la Convention que doivent venir les élections… Vous nuiriez au peuple en lui confiant le droit d’élire les fonctionnaires publics, parce que vous l’exposeriez à nommer des hommes qui le trahiraient. » — En conséquence, les maximes constitutionnelles de 1789 font place aux maximes contraires ; au lieu de soumettre le gouvernement au peuple, on soumet le peuple au gouvernement. Sous des noms révolutionnaires, la hiérarchie de l’ancien régime est rétablie, et désormais les pouvoirs, bien plus redoutables que ceux de l’ancien régime, cessent d’être délé-

  1. Moniteur, XVIII, 391 (Discours de Couthon, 4 décembre). — Discours de Barère : « Les assemblées électorales sont des institutions monarchiques ; elles tiennent au royalisme ; il faut surtout les éviter dans un moment de révolution. »