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LA RÉVOLUTION


province, les pelotons d’exécution à Lyon et à Nantes, ne sont que les collaborateurs des égorgeurs proprement dits, et les massacres légaux ont été imaginés pour compléter les massacres purs et simples.

De ce dernier genre sont d’abord des fusillades de Toulon, où le nombre des fusillés dépasse de beaucoup 1000[1] ; les grandes noyades de Nantes, où 4800 hommes, femmes et enfants ont péri[2] ; les autres noyades[3], pour lesquelles on ne peut fixer le chiffre des morts ; ensuite, les innombrables meurtres populaires commis en France depuis le 14 juillet 1789 jusqu’au 10 août 1792 ; le massacre de 1300 détenus à Paris en septembre 1792 ; la traînée d’assassinats qui, en juillet, août et septembre

    du juge est là, et les remplace… » Les commissions doivent être aussi des tribunaux politiques ; elles doivent se rappeler que tous les hommes qui n’ont pas été pour la Révolution ont été, par cela même, contre elle, puisqu’ils n’ont rien fait pour la patrie… Je dis aux juges, au nom de la patrie : Tremblez de sauver un coupable. » — Robespierre disait de même aux Jacobins, le 19 frimaire an II : « On juge, en politique, avec des soupçons d’un patriotisme éclairé. »

  1. Mémoires de Fréron (Collection Barrière et Berville), 364. — Lettre de Fréron, Toulon, 16 nivôse : « Il y a déjà 800 Toulonnais de fusillés. »
  2. Lallié, les Noyades de Nantes, 90 (Les onze noyades distinctes, constatées par M. Lallié, vont jusqu’au 12 pluviôse an II).
  3. Moniteur, XXII, 227 (Pièces officielles lues à la Convention, le 21 vendémiaire an III). Ces pièces constatent une noyade ultérieure, exécutée le 9 ventôse an II, par ordre de Lefebvre, adjudant général : 41 personnes ont été noyées, dont 2 hommes, l’un de 78 ans et aveugle, 12 femmes, 12 filles et 15 enfants, dont 10 de 6 à 10 ans et 5 enfants à la mamelle ; l’opération a eu lieu dans la baie de Bourgneuf. Ib., XXII, 578 (Paroles de Carrier à la Convention, à propos des noyades de femmes enceintes) : « À Laval, Angers, Saumur, Château-Gontier, partout, on a fait les mêmes choses qu’à Nantes. »