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LES GOUVERNÉS


de l’Église de France, il avait part, directement ou indirectement, à de grosses affaires temporelles, à des assemblées, à des délibérations, à des dépenses collectives, à l’établissement d’un budget local et d’un budget général ; par suite, en fait de choses publiques et d’administration, sa compétence était analogue et presque égale à celle d’un maire, ou d’un subdélégué, d’un fermier général ou d’un intendant. — Libéral de plus : jamais le clergé français ne l’a été si profondément, depuis les derniers curés jusqu’aux premiers archevêques[1]. — Notez enfin sa distribution sur le territoire. Dans la moindre des quarante mille paroisses, il y avait un curé ou un vicaire ; en des milliers de petits villages écartés et pauvres, celui-ci était le seul homme qui sût couramment écrire et lire ; dans nombre de communes plus grosses, mais rurales[2], sauf le seigneur résident et quelque homme de loi ou praticien d’éducation bâtarde, nul autre que lui n’était lettré[3]. Effectivement, pour qu’un homme, ayant fait

  1. Cf. les Cahiers du clergé aux États généraux, et les Rapports des ecclésiastiques dans les assemblées provinciales.
  2. L’Ancien Régime, II, 154 et suivantes.
  3. Dans quelques diocèses, notamment dans celui de Besançon, les cures rurales étaient souvent occupées par des hommes distingués (Sauzay, I, 16). « On n’y était pas surpris de voir un homme d’une renommée européenne, comme Bergier, si longtemps curé de Flangebouche, ou un astronome de grand mérite, comme M. Mongin, curé de la Grand’Combe des Bois, dont les travaux occupent une place si honorable dans la bibliographie de Lalande, passer leur vie au milieu des paysans. — À Rochejean, un prêtre d’un grand esprit et d’un grand cœur, M. Boillon, naturaliste distingué, avait fait de son presbytère un musée d’histoire naturelle en même temps qu’un excellent