Page:Taine - Les Origines de la France contemporaine, t. 8, 1904.djvu/343

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
339
LA FIN DU GOUVERNEMENT RÉVOLUTIONNAIRE


tous ceux qui ne parviendront point à entrer dans le nouveau Corps législatif intrigueront pour obtenir une place à Paris et deviendront « messagers d’État, employés dans les bureaux, huissiers dans les ministères » ; faute d’autre emploi, ils accepteraient d’être « balayeurs de la salle ». — Tous les refuges leur sont bons contre la réprobation publique qui monte et déjà les submerge sous son flot.

II

Nul autre refuge pour eux que le pouvoir suprême, et nul autre moyen de s’y maintenir que l’arbitraire, la déloyauté et la violence. Dans la Constitution qu’ils fabriquent, ils veulent rester les souverains de la France, et d’abord ils décrètent que, bon gré, mal gré, la France prendra parmi eux les deux tiers de ses nouveaux représentants[1] ; pour qu’elle choisisse bien, il est prudent de lui imposer ses choix.

À la vérité, sur les décrets spéciaux qui lui retranchent les deux tiers de son droit d’élire, on fait mine de la consulter ; mais, comme en 1792 et 1793, on lui fabrique sa réponse[2]. — En premier lieu, on a compté que la majorité des électeurs s’abstiendra de répondre. En

  1. Décrets du 5 et du 13 fructidor an III.
  2. Mallet du Pan, Correspondance avec la cour de Vienne, I, 292 (30 août 1795). — Moniteur, XXV, 518, 551 (séance du 3 fructidor). — Le projet primitif de la commission des Onze était de faire choisir les deux tiers par la Convention elle-même. « Les opposants, dit Mallet du Pan, ont profité du cri public pour renverser cette entreprise de la cabale girondine. » — Le 3 fructidor, Louvet monte trois fois à la tribune, afin de soutenir le pro-