Page:Taine - Les Philosophes classiques du XIXe siècle en France, 1868.djvu/193

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faut être, et il n’est pas. De plus, sa grandeur continue à trois dimensions se confond absolument avec celle des corps, qu’on appelle étendue : ce qu’on exprime en disant que les corps occupent l’espace. L’espace est donc l’étendue abstraite séparée du corps, non réelle, purement possible, et portée à l’infini.

Voyons maintenant ce que nous entendons par infini. Ces traductions, à demi grammaticales, à demi logiques, sont la seule lumière en philosophie ; les maîtres du dix-huitième siècle nous les enseignent ; il faut les faire et comprendre parfaitement son idée, avant d’expliquer comment elle peut se former. Dire qu’une grandeur est infinie, c’est dire qu’elle exclut toute limite, et que, si elle était limitée, il y aurait en elle une contradiction. Concevoir l’espace comme infini, ce n’est pas apercevoir expressément et distinctement par un seul acte de l’esprit la totalité de ses parties, c’est simplement lui concevoir une limite quelconque, analyser cette idée de limite et y trouver une contradiction. C’est donc encore une analyse qui me fera concevoir l’espace comme infini. Et cette analyse portera comme précédemment sur une idée générale, puisqu’elle portera sur l’idée d’une limite quelconque, c’est-à-dire d’une limite en général. Cette idée sera donc tirée comme précédemment d’un cas particulier, et il suffira pour la former