Page:Taine - Les Philosophes classiques du XIXe siècle en France, 1868.djvu/87

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stable, au-dessus duquel l’autre luit et s’agite. Nous avons touché la terre solide au-dessous des vapeurs trompeuses qui éblouissent les yeux vulgaires. Nous avons saisi un de ses hôtes, et nous savons comment elle est habitée. En observant notre force, nous savons ce que sont les siennes, et notre première découverte est qu’elles sont spirituelles. « Car nulle cause ou force ne peut se représenter sous une image qui ressemble à l’étendue ou à ce que nous appelons matière. » « Toute cause efficiente dans l’ordre physique même est une force immatérielle. » « Les êtres sont des forces, les forces sont des êtres : il n’y a que les êtres simples qui existent réellement à leur titre de forces ; ce sont aussi les véritables substances existantes. » « Aussi les esprits conséquents et qui pensent comme il faut, se trouvent-ils econduits au point de spiritualiser le monde, comme a fait Leibnitz, en n’admettant d’autre réalité que celle des êtres simples dont toute l’essence est la force active. Dès lors l’étendue n’est qu’un pur phénomène relatif à notre manière de nous représenter les existences autres que la nôtre par le sens de l’intuition[1]. » La psychologie ainsi maniée devient une métaphysique. L’observation du moi a restauré la doctrine des monades. La

  1. Tome IV, Examen des leçons de M. Laromiguière, p. 281 et 398 ; tome III, p. 14, 16,56.