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Page:Tallemant des Réaux - Historiettes, Mercure de France, 1906.djvu/193

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attendoient ne la trouvoient pas à leur goût, elle retournoit incontinent par la même voie ; mais si elle leur plaisoit, ils en faisoient ce qu’ils pouvoient.

Il cajola, je ne sais où, la veuve d’un bourgeois, nommé Brunetière. Cette femme étoit jolie, jeune et sans enfants ; et quoique cet homme lui parût extravagant et mal bâti, car il étoit tout percé de coups et quasi estropié, elle se mit pourtant si bien dans la tête qu’il la vouloit épouser que, quoiqu’il lui eût dit depuis mille fois qu’il n’y avoit jamais pensé, et qu’il en disoit autant à toutes les veuves et à toutes les filles. elle ne laissa pas de le croire, de l’aimer et d’être dans une profonde mélancolie jusqu’à ce qu’elle l’eût vu marié avec une autre ; après, elle se guérit quand elle n’eut plus d’espérance.

Voici comment Fontenay se maria : il eut connoissance d’une grosse demoiselle des Cordes, veuve d’un auditeur des comptes, qui étoit mort incommodé, de sorte que cette femme n’avoit pu retirer toutes ses conventions matrimoniales ; elle vivotoit tout doucement, et alloit manger chez madame Rouillard et chez madame Le Lièvre, de la rue Saint-Martin, qui étoient des femmes riches et ses voisines. Fontenay, alors capitaine aux gardes, la trouva à son goût ; elle étoit gaie et agissante. Le mariage fut fait du soir au matin : cette fois- là il trouva chaussure à son pied ; car c’étoit une maîtresse femme, qui le rangea si bien qu’on dit que de peur il s’alla cacher une fois dans le grenier au foin. Cela excuse Bazinière, que Fontenay Coup-d’Epée ait choisi même retraite que lui. Il ne dura guère, et elle s’est remariée.

Pour le chevalier de Miraumont, son camarade, ce fut aussi un brave. Il y avoit certaines gardes d’épée qu’on appeloit à la Miraumont. C’étoit un assez plaisant homme. « Mon père, disoit-il, fit un jour apporter demi-douzaine d’œufs frais pour déjeuner. J’en mangeai quatre ; mon père me dit : — Vous êtes un sot. — Je lui répondis : «