Aller au contenu

Page:Tallemant des Réaux - Historiettes, Mercure de France, 1906.djvu/255

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

m’y tient plus. » L’idiote, qui entendoit cela, trembloit de peur qu’il ne lui en fît autant, et lui donnoit deux fois plus qu’elle n’eut fait. Avec cela il étoit médisant comme le diable : il n’y avoit personne à sa fantaisie. De Pologne il alla en Suède, et revint ici avec la reine Christine.


SÉVIGNY ET SA FEMME[1]

Sévigny, qui par la faveur du coadjuteur, son parent, à qui l’abbé de Livry, Coulanges, fou de la mère, avoit voulu faire sa cour, avoit épousé cette jolie mademoiselle de Chantal, de la maison de Rabutin de Bourgogne, qui avoit cent mille écus en mariage. Ce Sévigny devint amoureux de madame de Gondran. Pour moi, j’eusse mieux aimé sa femme. Pour réussir en son dessein, il se met à faire la débauche avec le mari et à le mener promener. Il étoit une fois au Cours avec lui, et le chevalier de Guise se mit avec eux. Gondran disoit qu’il n’y avoit point d’homme plus heureux que lui, qui étoit toujours en festin, et avec de grands seigneurs ; que les gens de la cour étoient autrement agréables que les gens de la ville, et qu’il ne pouvoit plus souffrir les bourgeois. Le chevalier de Guise demanda à voir la belle madame de Gondran ; le mari ne s’y opposa pas autrement, mais la belle-mère ne le voulut pas. M. d’Aumale, depuis M. de Reims, aujourd’hui M. de Nemours, y fut reçu : je pense que sa soutane rassura la bonne femme.

Ce Sévigny n’étoit point un honnête homme, et ruinoit sa femme, qui est une des plus aimables et des plus honnêtes personnes de Paris. Elle chante. elle danse, et a l’esprit fort vif et fort agréable ; elle est brusque et ne peut se

  1. Madame de Sévigné.