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Page:Tallemant des Réaux - Historiettes, Mercure de France, 1906.djvu/303

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MADAME DE LANGEY

ministre Gache et le médecin L’Aimonon, qui est à M. de Longueville, soutenoient qu’il étoit comme il falloit, l’un se fioit à ce qu’il étoit trop craignant Dieu pour mentir, et l’autre disoit qu’il étoit de trop bonne race du côté de père et de mère. Menjot, le médecin, disoit plaisamment qu’ils étoient les deux c…… de Langey : M. L’Aimonon le droit et M. Gache le gauche.

Madame de Lavardin et madame de Sévigny[1], amies du lieutenant civil, étoient en carrosse à deux portes de là où il les alla trouver après ; on les entendoit rire du bout de la rue. On prétendit que le lieutenant civil avoit été favorable à Langey à cause de madame de Lavardin.

Il y eut bien des procédures pour cela, qui firent durer la chose près de deux ans ; on ne parloit que de cela partout Paris. Je me souviens que, sur le rapport des experts, des femmes disoient : « Jésus ! on disoit qu’elle étoit si bien faite ! Regardez ce qu’en disent ces gens-là. Elle est bien faite pourtant ! » Les femmes s’accoutumèrent insensiblement à ce mot de congrès, et on disoit des ordures dans toutes les ruelles. Une parente de la dame dit un jour de visite, parlant de Langey : « On a trouvé la partie bien formée, mais point animée. » Madame Le Cocq, au lieu d’ôter sa fille, la laissa coucher avec madame de Langey. Je pense qu’elle y aura appris de belles choses. Il est vrai qu’elle l’ôta quand on en vint au congrès ; mais il étoit bien temps. On en fit des vers, méchants à la vérité, mais qui disoient bien des saletés. Les vaudevilles ne chantoient autre chose, et madame Le Cocq alloit débitant tout ce qu’elle savoit là-dessus, car c’est la plus grande parleuse de France ; les paroles sortent de sa bouche comme les gens sortent du sermon. On l’appeloit, lui, le marquis de Congrès. Il avoit le portrait de sa femme, et montroit partout de ses lettres. Un jour qu’il disoit à madame de Gon-

  1. La marquise de Sévigné.