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vers étoient médiocres, mais il avoit assez de feu ; sa prose, à tout prendre, valoit mieux. Il savoit, et avoit de l’esprit ; il a eu en un temps toute la vogue qu’on sauroit avoir.

Henri IV le fit précepteur de M. le Dauphin, après qu’il eut été précepteur de M. de Vendôme[1]. Il s’est plaint qu’on ne vouloit pas qu’il fît du feu Roi[2] un grand personnage. Durant la régence on lui ôta cette place par intrigue ; peut-être la plainte que le clergé fit contre lui, et qui est imprimée dans les Mémoires ensuite de ceux de M. de Villeroi, y servit-elle[3].

On l’a accusé de ne croire que médiocrement en Dieu. Je ne lui ai pourtant jamais ouï dire d’impiétés. Il est vrai que je ne l’ai connu que deux ans avant qu’il mourût. On l’accusoit aussi d’aimer les garçons. Pour les femmes, il les a aimées jusqu’à la fin, et a toujours mené une vie peu exemplaire. Il passoit pour médisant, et pour aimer le vin. Quelquefois il étoit long-temps sans parler. On dit que Pluvinel et lui firent un voyage de Paris à Nantes et en revinrent, jouant toujours aux échecs sans se dire mot pour cela. Ils avoient une machine dans le carrosse.

Il disoit que les courtisans appeloient bon temps le temps où les pensions étoient bien payées.

  1. Il fit pour celui-ci l’Institution du Prince en vers (T.). Cette pièce a dû être imprimée séparément avant 1612 ; car, citée dans le discours adressé à la Reine, dont il va être question, elle a été ensuite insérée dans les Délices de la Poésie françoise ; Paris, Toussainct Du Bray, 1615, p. 417.
  2. Louis XIII.
  3. Voyez le Discours présenté à la Reine-mère du Roi, en l’année 1612, à la suite des Mémoires d’État, par M. de Villeroi, tom. 5, pag. 199, Amsterdam, 1725.