Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 1.djvu/361

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votre fouet ; gare votre gouvernement. » Dès l’été suivant, le cardinal le lui fit ôter pour le donner à un homme qui n’eût pas tant de crédit, ce fut à Parabelle.

Le cardinal apparemment avoit déjà en tête ce que je vais rapporter. Au voyage de Lyon, où le Roi fut si mal, la Reine-mère demanda en grâce au Roi qu’il chassât le cardinal. Il lui promit de le chasser dès que la paix d’Allemagne seroit faite, mais qu’il avoit affaire de lui jusque là. Le Roi, étant guéri, part et va à Rouane. La Reine-mère étoit demeurée à Lyon, à cause qu’elle avoit mal à un pied. De Rouane, le Roi lui écrivit qu’elle se guérît, qu’il lui donneroit bientôt contentement, que la paix d’Allemagne étoit faite, et qu’il en envoyoit la ratification.

La Reine-mère fut si aise de cette nouvelle, qu’à la chaude elle fit brûler quelques fagots comme pour faire une espèce de feu de joie. Le cardinal sut qu’elle avoit fait ce feu, et il se douta de quelque chose. Il presse le Roi. Le Roi lui confesse tout ; la Reine-mère vient à Rouane. Le cardinal, comme elle communioit à l’église, s’approcha d’elle, et fit signe à Saint-Germain qui, comme aumônier, étoit auprès d’elle, de se retirer. Il la conjura de lui pardonner : elle le rebuta : « Madame, lui dit-il, j’en ferai bien périr avec moi. » C’est de là qu’est venue la rupture sans rime ni raison de la paix de Ratisbonne. À Lyon, tout le monde, c’est-à-dire toutes les cabales, étoient contre le cardinal. Au retour, il fit arrêter le maréchal de Marillac, et le garde-des-sceaux fut mené à Angoulême, et M. de Châteauneuf eut les sceaux. Cela irrita furieusement la Reine-mère. Le cardinal lui fit parler