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envoya toutes trois au cardinal Du Perron. Il dit à celui qui lui en demanda son avis de la part de la dame : « Dites-lui qu’elle a fait admirablement bien la première partie de la vie de la Magdelaine. » Un jour qu’elle lui demanda si faire l’amour étoit véritablement un péché mortel : « Non, dit-il, car si cela étoit, il y a long-temps que vous en seriez morte. »




LE CARDINAL DU PERRON[1].


Le cardinal du Perron étoit fils d’un ministre nommé David[2]. Il changea de religion et vint à Paris, où il fit connoissance avec l’abbé de Tiron[3], qui en faisoit cas à cause de son esprit. Du Perron étoit fort colère et fort vindicatif. En un cabaret, il prit querelle avec un homme, et quelque temps après, ayant rencontré ce même homme, il le fit tenir par trois ou quatre autres qu’il avoit avec lui et le poignarda. Le voilà en prison. Desportes, alors en grand crédit, composa avec les parents du mort pour deux mille écus qu’il prêta à du Perron. Ses vers lui acquirent de la réputation, et aussi la facilité qu’il avoit à parler. Il fit un jour un discours devant Henri III, pour prouver qu’il y avoit

  1. Du Perron (Jacques Davy, cardinal) né le 25 novembre 1556, d’une famille protestante réfugiée, mort le 5 septembre 1618.
  2. Quand le cardinal fut grand seigneur, il signa d’Avit pour se dépayser et faire croire qu’il étoit d’une maison qui s’appeloit Avit.
  3. Le poète Desportes, dont l’Historiette précède immédiatement celle-ci.