Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 2.djvu/113

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détourner, il lui dit ce passage d’Horace, de Arte poeticâ :

Segniùs irritant animos demissa per aures
Quàm quæ sunt oculis subjecta fidelibus…….


Depuis, cette pièce a été imprimée durant la Fronde, et a fait voir que Bautru avoit eu bon nez.

Ce fut lui aussi qui mit bien le comte de Charost avec le cardinal. Ce ministre étoit allé se promener à l’abbaye de Royaumont. Bautru l’y fut trouver : « Avec qui êtes-vous venu ? lui dit le cardinal. — Avec Charost. — Eh ! de quoi vous êtes-vous avisé d’amener ce fastidieux personnage ? — Ah ! monseigneur, si vous saviez combien il a de zèle et de tendresse pour Votre Éminence, vous n’en parleriez pas ainsi. On n’a jamais tant aimé une maîtresse qu’il vous aime. » Depuis cela, le cardinal eut de l’estime pour Charost.

Comme il passoit un enterrement où on portoit un crucifix, il ôta son chapeau : « Ah ! lui dit-on, voilà qui est de bon exemple. — Nous nous saluons, répondit-il, mais nous ne nous parlons pas. »

Il disoit d’un certain Minime qu’on vouloit faire passer pour béat, que le seul miracle qu’il avoit fait, c’étoit que, ne mangeant que du poisson, il sentoit l’épaule de mouton en diable.

Il disoit que Rome étoit une chimère apostolique ; et à une promotion de cardinaux que fit le pape Urbain, où il n’y avoit guère de gens de qualité (je pense qu’ils étoient dix en tout), Bautru, en lisant leurs noms, disoit : « N’en voilà que neuf. — Eh ! vous ou-