d’un esprit plus de feu. Il a toujours eu de grands desseins en tête. Un temps il ne faisoit que prêcher la guerre sainte. M. de Mantoue, M. de Brèves, madame de Rohan et lui, prenoient fort souvent tout l’État du Turc[1]. Depuis, il prit la maison d’Autriche pour but, et il travailla fort avec M. de Charnacé à faire entrer le roi de Suède en Allemagne. Il se vantoit d’être né pour abattre la maison d’Autriche. Effectivement ce n’étoit pas un sot ; il soulageoit fort le cardinal, et le cardinal ne faisoit pas un pas sans lui. Au commencement il alloit à cheval. Le Père Ange Soubini avoit un jour un cheval entier, et lui une jument. Ce cheval grimpe la jument, et les capuchons des deux moines faisoient la plus plaisante figure du monde[2]. Pour éviter ce scandale, on lui donna un carrosse. Depuis, il eut litière et toute chose ; et il alloit être cardinal s’il ne fût pas mort.
En une petite ville de quelque province de France, un homme de la cour alla voir un Capucin. Les principaux le vinrent entretenir. Ils lui demandèrent des nouvelles du Roi, puis du cardinal de Richelieu. « Et après, dit le gardien, ne nous apprendrez-vous rien de notre bon Père Joseph ? — Il se porte fort bien, il est exempt de toutes sortes d’austérités. — Le pauvre homme ! disoit le gardien. — Il a du crédit ; les plus grands de la cour le visitent avec soin. — Le pauvre homme ! — Il a une bonne litière quand on