Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 2.djvu/153

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où il appeloit l’Angleterre un climat barbare. Étourdiment il la montra à madame de Chevreuse, qui, aussi sage que lui, alla dire au comte de Carlisle et au comte d’Holland qu’il avoit fait une élégie, et la lui envoya demander pour la leur montrer. Il répondit qu’il ne l’avoit point, et que quand il l’auroit, elle savoit bien qu’il ne devoit point l’avoir. « Ah ! leur dit-elle, vous ne savez pas pourquoi il ne la veut pas donner, c’est qu’il y appelle l’Angleterre un climat barbare. » Le comte de Carlisle ne se tourmenta pas autrement de cela ; mais le comte d’Holland, qui prétendoit en galanterie, en querella Bois-Robert, la première fois qu’il le vit, et même en présence de madame de Chevreuse. Bois-Robert s’excusa, et dit qu’il tenoit pour barbares tous les lieux où il étoit malade, et qu’il en auroit dit autant du paradis terrestre en pareille occasion, « et depuis que je me porte bien, et que le Roi m’a fait la grâce de m’envoyer trois cents jacobus, je trouve le climat fort radouci. » Le comte de Carlisle oyant cette réponse, dit : « Cela n’est pas mal trouvé ; » mais l’autre enrageoit. Au retour, ils accompagnèrent madame de Chevreuse, et Bois-Robert, à quelques milles de Londres, en montant un coteau qui est sur le bord de la Tamise, comme tout le monde étoit descendu à cause que le chemin est fort rude : « Mon Dieu ! madame, dit-il, le beau pays ! — C’est pourtant un climat barbare, » dit le comte d’Holland, qui avoit toujours cela sur le cœur. Bois-Robert avoit acheté quatre haquenées. Il fit demander par madame de Chevreuse permission au duc de Buckingham, grand amiral, de les faire passer en France. Buckingham, dans le passe-