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personne. M. de Montausier les alla quérir. Elles ont été, à plusieurs reprises, à l’hôtel de Rambouillet, à cause des troubles qui les empêchoient de demeurer à La Villette, où on les avoit mises en attendant.

Voici comment madame de Saint-Étienne eut cette abbaye. La pénultième abbesse de Saint-Étienne, croyant que Dieu en seroit mieux servi, remit l’élection dans cette maison, et, avec le consentement du Roi, obtint en cour de Rome tout ce qui étoit nécessaire pour ce nouvel établissement, avec cette exception toutefois que celle qui a été la dernière abbesse lui succéderoit. Cette dernière a vécu fort long-temps, et plus de dix ans avant sa mort, ses religieuses commencèrent à faire des brigues. Cela mit un tel désordre dans le couvent que cette pauvre abbesse, ayant quelque crédit auprès de madame La Palatine[1], qui avoit été quelque temps sa pensionnaire, la supplia très-humblement de faire en sorte que le roi nommât une coadjutrice, et qu’on remît les choses en leur premier état. Madame La Palatine en parle à madame la marquise de Rambouillet, qui obtient le brevet pour madame de Rambouillet, la religieuse. Aussitôt les cabaleuses de Saint-Étienne font les enragées jusqu’à enfermer leur abbesse, la traiter de radoteuse, et lui envoyer des poupées, comme si elle eût été en enfance. Elles se pourvoient contre la nomination du Roi. Enfin, après bien de la peine, tant par le support de l’archevêque, que par le crédit de la famille, l’affaire fut jugée au conseil d’en haut à l’avantage de madame de Rambouillet, et le sacre du Roi s’étant fait incontinent

  1. Anne de Gonsague, princesse Palatine.