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plusieurs qui, à cause du grand papier et de la reliure, reviennent à dix écus et davantage, et cinquante qu’il lui a fallu donner encore et qu’il n’a point payés, il est constant que le libraire lui a donné deux mille livres, et depuis mille livres, quand, pour empêcher la vente de l’édition de Hollande[1], il en a fallu faire ici une en petit, parce que dans le traité il y a deux mille livres pour la première édition et mille livres pour la seconde.

Les observations du sieur Du Rivage fâchèrent fort la cabale, et M. de Montausier, en parlant à La Ménardière, qui s’est déguisé sous ce nom-là, dit, après avoir bien parlé contre cet écrit : « Que celui qui l’avoit fait mériteroit des coups de bâton ; » et il vouloit qu’on bernât Linière[2] au bout du Cours. C’est un petit fou qui a de l’esprit, et qui, je ne sais par quelle chaleur de foie, a fait des épîtres et des épigrammes contre M. Chapelain, devant et après l’impression de la Pucelle. Il y a une épigramme fort jolie qu’on lui a raccommodée ; la voici :

La France attend de Chapelain,
Ce rare et fameux écrivain,
Une merveilleuse Pucelle.
La cabale en dit force bien ;
Depuis vingt ans on parle d’elle :
Dans six mois on n’en dira rien.


C’est pour faire voir que beaucoup de gens en étoient

  1. C’est l’édition sortie des presses des Elzeviers, et la seule qui soit aujourd’hui recherchée par les amateurs de livres rares. Elle porte la date de 1656 comme l’édition originale.
  2. François Payot de Linière, auteur satirique, mort en 1704.