Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 2.djvu/434

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Quand la Reine alla dire adieu à M. d’Orléans, lui, sa femme et sa fille ne la traitèrent pas comme ils le devoient ; il ne la reconduisit pas jusqu’à son carrosse. Qui reconduira-t-il, s’il ne reconduit pas une reine ? Il en devoit faire plus que pour une autre, quand ce n’eût été qu’à cause qu’il l’avoit aimée. Madame et Mademoiselle étoient jalouses de l’honneur qu’on lui faisoit. Monsieur lui ayant dit quelque chose du temps passé, elle lui répondit : « Cela n’étoit pas résolu dans le ciel, et j’étois née pour être reine. » Elle eut le déplaisir, avant que de quitter Paris, d’apprendre qu’on avoit fait quelque médisance d’elle et de M. le Grand, et même de Langeron, qui, comme bailli de Nevers, avoit de tout temps de l’attachement à sa maison. On soupçonna le résident en France du roi de Pologne, qui étoit un ecclésiastique de Rome nommé Roncaille, de lui avoir rendu quelques mauvais offices à la cour de son maître. J’ai de la peine à le croire, car elle a été assez bien depuis pour le faire révoquer s’il lui eût déplu. Quoi qu’il en soit, elle ne fut pas d’abord fort bien reçue en Pologne ; puis, le Roi étant malade, elle n’eut pas lieu de le gagner, n’ayant pas encore couché avec lui. Elle ne fut pas long-temps après à se mettre bien dans son esprit, et en peu de temps elle fit congédier la dame d’honneur que le Roi lui avoit donnée, parce qu’il en étoit un peu épris.

La maréchale de Guebriant, et l’évêque d’Orange, qui l’avoient accompagnée, comme ambassadeur du Roi, en revinrent fort mal satisfaits. L’évêque n’eut que quelques pièces de vaisselle d’argent de peu de valeur, et madame de Guebriant, que deux tapis de soie relevés d’or. La reine de Pologne en a envoyé depuis