Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 2.djvu/6

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mais d’une branche si éloignée, que la Reine ne la reconnoissoit en aucune façon pour sa parente. Ce nom de Médicis ne fut pas inutile à Marillac. Il le fit valoir comme il avoit prétendu. C’étoit lui qui étoit toujours dépêché pour les affaires de la Reine-mère ; et, comme il s’acquittoit bien de toutes ses commissions, insensiblement il se rendit considérable. M. de Luçon[1] crut que cet homme ne lui seroit pas inutile ; les voilà unis. Dans les guerres d’Italie, Marillac demande de l’emploi ; il en a, et, hors de payer de sa personne, il faisoit tout admirablement bien. On croit qu’il eût pu devenir grand capitaine, car il y en a eu qui ont fait bien du bruit sans aller aux coups. Il est vrai qu’en France cela est plus difficile qu’en Espagne et qu’en Italie. On disoit qu’à Rouen, ayant pris querelle à la paume avec un nommé Caboche, et ayant été séparés, il le rencontra après, et le tua avant que l’autre ait eu le loisir de mettre l’épée à la main. C’étoit devant qu’il eût de l’emploi. Il prétendit être maréchal de France et le fut, et son frère aîné, qui étoit de robe, gardes-des-sceaux. Depuis, ils cabalèrent pour débusquer le cardinal, et Vaultier craignoit qu’ils eussent toute l’autorité chez la Reine. Le cardinal, qui dans son Journal appelle toujours ce maréchal Marillac l’Épée, le fit arrêter, et le fit condamner fort légèrement. Ce fut à Ruel, dans la propre maison du cardinal, que le maréchal de Marillac étoit gardé. Comme ce maréchal n’étoit pas un sot, il déclina, et ne voulut pas reconnoître des commissaires. Enfin on l’enjôla, et ses propres parents y servirent innocemment. On

  1. Richelieu, qui n’étoit encore, à cette époque, qu’évêque de Luçon.