Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 3.djvu/384

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tairement de sa surintendance, lorsqu’il avoit comme refait sa paix, et que d’Émery étoit mort.

Dès ce temps-là la dévotion l’avoit pris. Un jour, Ogier, le prédicateur[1], à qui il avoit donné deux mille livres de rente sur cette abbaye de son neveu, ayant pressenti que M. d’Avaux méditoit sa retraite, lui dit, comme ils étoient dans cette belle maison qu’il a fait bâtir rue Sainte-Avoie[2] : « Voici qui est magnifique ; mais ce n’est rien en comparaison de cette maison céleste, etc. » L’autre s’ouvrit à lui. Il avoit résolu de se retirer dans une espèce de désert en Bretagne, d’y bâtir quelque couvent, ou même d’instituer quelque nouvel ordre ; car ne croyez pas que cet homme manquât de vanité, il en avoit : témoin cette maison dont nous venons de parler. Elle revient à huit cent mille livres ; cependant elle est petite, et il n’y a pas un appartement complet : la place seule lui tenoit lieu de deux cent cinquante mille livres. Dans leur partage, il y avoit des maisons qu’on louoit fort bien ; ailleurs, pour la somme qu’il y a employée, il eût fait un beau bâtiment ; mais il vouloit bâtir in fundo avito, car les de Mesme se piquent furieusement de noblesse, quoique leur bisaïeul ne fût qu’un docteur en droit à Toulouse ; mais ils disent que c’étoit un gentilhomme qui montroit le droit pour son plaisir, et qu’ils font venir

  1. François Ogier, prédicateur du Roi, acquit dans son temps de la célébrité. Il prit la défense de Balzac contre le père Goulu, général des Feuillants, qui l’avoit grossièrement attaqué.
  2. Cet hôtel subsiste encore ; mais il a éprouvé de grands changements, parce qu’il a été converti en maison de commerce. Il est situé dans la rue Sainte-Avoie, vis-à-vis d’un passage nouvellement ouvert, qui conduit à la rue du Chaume.