Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 3.djvu/46

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plaider lui-même sa cause. Haute-Fontaine, en plaidant, fit tant de différentes interrogations à ces sergents, et les tourna de tant de côtés, qu’il les confondit tous l’un après l’autre, à un près, qui n’avoit point encore parlé, auquel s’adressant : « Et vous, lui dit-il, soutenez-vous aussi que je vous aie battu ? — Non, dit le sergent, parce que, incontinent que vous me menaçâtes, je sorta. — Il est vrai, monsieur, répliqua Haute-Fontaine, il sorta tout aussitôt, mais incontinent après il rentrit. » Le juge se prit à rire, et mis les parties hors de cour et de procès.




MESDAMES DE ROHAN.


Madame de Rohan[1], mère du premier duc de Rohan[2], qui a tant fait parler de lui, étoit de la maison de Lusignan, d’une branche qui portoit le nom de Parthenay. C’étoit une femme de vertu, mais un peu visionnaire. Toutes les fois que M. de Nevers, M. de Brèves et elle se trouvoient ensemble, ils conquêtoient tout l’empire du Turc[3]. Elle ne vouloit point que

  1. Catherine de Parthenay-Soubise, femme de René, deuxième du nom, vicomte de Rohan.
  2. Henri, deuxième du nom, premier duc de Rohan, auteur des Mémoires publiés sous ce nom ; né le 21 août 1579, mort le 13 avril 1638.
  3. Ce M. de Brèves, à ce qu’on dit, appela le pape le grand Turc des chrétiens. Il cria : Alla, en mourant, et sans Gédoin, le Turc, qui croyoit en Notre Seigneur comme lui, il ne se fût jamais confessé ; mais Gédoin lui dit qu’il le falloit faire par politique. (T.)