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avoit été disgraciée, il y avoit long-temps, pour n’avoir pu se ranger du côté de Chabot[1].

Madame de Rohan-Chabot fit deux fois abjuration ; la première fois à Sully, où l’on ne voulut point la marier qu’elle ne fût catholique, dont elle fit reconnoissance à Gergeau ; et depuis elle fit encore abjuration à Saint-Nicolas-des-Champs, parce que le Pape ne donna dispense de parenté qu’à condition qu’elle se feroit catholique. Il fallut donc encore en passer par là, afin de rendre le mariage plus solennel. Je crois qu’on n’a pas su cette dernière abjuration à Charenton, car je doute qu’on se fût contenté d’une simple reconnoissance au consistoire comme on fit, car celle de Gergeau n’étoit pas faite à son église (Paris est son église).

Madame de Rohan, en colère, comme vous pouvez penser, contre sa fille[2], apprit de madame de Lansac qu’on lui avoit autrefois enlevé un fils. Dès qu’elle eut assurance qu’il vivoit, elle congédia Vardes, qui avoit succédé à Miossens, car elle ne pouvoit pas fournir à tant de dépense à la fois ; elle envoie Rondeau, son valet-de-chambre, en Hollande, qui amena Tancrède ; mais la grande faute qu’on fit, ce fut de n’avoir pas informé devant les juges des lieux, et venant ici on eût été reçu à preuve, c’est-à-dire on eût gagné le procès, car, avec de l’argent, on a des témoins. Et bien qu’il soit difficile de corrompre un ministre, il

  1. Depuis elle s’est fait traiter d’Altesse, elle qui ne s’en avisoit pas quand elle n’avoit point épousé Chabot. (T.)
  2. Car pour Chabot ni elle, ni madame de Sully, la bonne femme, ne dirent jamais rien contre lui. « Au contraire, disoient-elles, il a bien fait. » (T.)