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Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 3.djvu/95

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j’ai dit, les autres en jalousie ; car M. Du Plessis lui ayant écrit qu’il le prioit de le venir trouver en maison tierce, afin de conférer à loisir et en secret, Ferrier épia l’heure que M. Du Plessis étoit avec des évêques et des chevaliers de l’ordre, et, entrant, courut l’embrasser, et lui dit tout haut qu’il n’y avoit point de différence de religion qui l’empêchât de lui rendre ce qu’il lui devoit, et fit tant que les catholiques qui se trouvèrent à cette visite crurent en effet que cet homme pourroit bien leur échapper, et pour le retenir, ils lui firent augmenter sa pension.

Depuis, il fut connu du cardinal de Richelieu, qui le mena au voyage de Nantes, durant lequel il coucha toujours dans sa garde-robe, et le cardinal le goûta tellement qu’il lui donna le brevet de secrétaire d’État ; auparavant il avoit fait beaucoup de dépêches, et pour quelque affaire qui survint, il eut l’ordre de prendre la poste pour se rendre à Paris le plus tôt qu’il lui seroit possible. Il avoit déjà de l’âge ; il n’étoit point accoutumé à ce travail, la fièvre le prit à son arrivée à Paris, et il en mourut au bout de huit jours avec un regret extrême de ne pouvoir jouir de l’emploi avantageux qui lui étoit destiné, et pour lequel il avoit pris tant de peine.

Sa femme demeura de la religion ; mais ses enfants, un fils et une fille, furent catholiques. Le fils, comme nous verrons ailleurs, ne dura guère ; la fille, devenue héritière, fut enlevée par un M. d’Oradour de Limousin, qui avoit aussi été de la religion, et que M. de La Meilleraye affectionnoit. Elle fit tant la diablesse qu’il fut contraint de la rendre. Il se paroit pour