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dit : « Bien, allez donc avertir madame. » Elle s’ajusta un peu, et puis revint. Lui, lui disoit : « Mais madame ne veut-elle pas venir ? » Enfin, elle fut contrainte de lui dire que c’étoit elle. Il la mena, mais en enrageant. Elle vouloit qu’il entrât avec elle ; il s’en excusa, et lui envoya le carrosse du premier qu’il rencontra pour la ramener[1].




DU MOUSTIER[2].


Du Moustier étoit un peintre en crayon de diverses couleurs ; ses portraits n’étoient qu’à demi et plus petits que le naturel. Il savoit de l’italien et de l’espagnol ; je pense qu’il aimoit fort à lire, et il avoit assez de livres. C’étoit un petit homme qui avoit presque toujours une calotte à oreilles, naturellement enclin aux femmes, sale en propos, mais bon homme et qui avoit de la vertu. Il étoit logé aux galeries du Louvre

  1. Le lieutenant-criminel Tardieu et sa femme, aussi avare que lui, furent assassinés le 24 août 1665, dans leur maison du quai des Orfèvres. Tout le monde connoît les beaux vers de la dixième satire dans lesquels Despréaux peint ce hideux couple. Tallemant fait connoître plusieurs traits de leur avarice qui avoient échappé au satirique.
  2. Daniel Du Moustier, célèbre peintre de portraits, né vers 1550, mort en 1631. Il excelloit pour le portrait au crayon en trois couleurs. (Voyez la Biographie universelle de Michaud.) L’auteur de l’article ne paroît pas avoir connu une seule des anecdotes racontées par Tallemant. On conserve à la Bibliothèque Sainte-Geneviève deux volumes in-folio remplis de portraits dessinés par Du Moustier. Il y en a beaucoup qui ne sont qu’ébauchés ; un grand nombre représentent malheu-