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Page:Tamizey de Larroque - Mélanges.djvu/26

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tambour sur le fossé de l’hostel de ville, au Marché, à St-Projet, se rendirent dans la maison du sieur Vivey, thrésorier de France, où ils mirent le feu. M. le compte (sic) de Montegut, lieutenant du Roy en Guyenne et gouverneur du chasteau Trompette où ledit sieur Vivey s’estoit sauvé, en sortit avec quelques compaignies, print des prisonniers et mit en fuite le reste de ces mutins. Le landemain le mal fut plus grand ; tout le quartier de St-Michel se mit soubs les armes ; un nommé Jambe de bois à la teste ; à Ste-Eulalie on fit de mesme, laissant entrer les paisans dans la ville, le baffroy sonnant à St-Michel et à Ste-Eulalie ; le parlemant, les chambres assemblées, envoia des commissaires par les rues et à l’hostel de ville pour calmer cet orage ; M. le mareschal d’Albret, gouverneur de la province, agit de son costé. Les commissaires du parlement furent fort maltraités surtout M. d’Andraut, conseiller en la grand’chambre[1], et M, Dalon, advocat général[2]. M. Tarneau, conseiller aux Enquestes[3], feut tué devant sa maison qui est sur le fossé de l’hostel de ville pour n’avoir vouleu crier vive le Roy sans gabelle. Sa Majesté a conservé son office à sa famille qui estoit vacante aux parties casuelles et a donné 3, 000 livres de pension annuelle à la dame sa femme qui ayant coureu pour sauver son mary récent des coups de ces séditieux[4] qui demandèrent au parlement un arrest par force et violance, à quoy j’estime que ne s’applique pas mal le passage de Valère Maxime : non patrem conscriptorum volontate, sed letterima necessitate truculenta manu illi senatusconsulto stilum suum impressit[5]. Sa Majesté envoia

  1. Sur le conseiller Andraut, voir l’Histoire du Parlement de Bordeaux par Boscheron des Portes (tome Il, p. 201).
  2. Sur l’avocat-général Dalon, voir le Parlement de Bordeaux, par M. Communay (p. 124 et suiv.)
  3. Sur le conseiller Tarneau, voir l’ouvrage de Boscheron des Portes (tome II, p. 201).
  4. J’ai publié, dans le tome XVIII des Archives historiques du département de la Gironde (1878, p. 406), une lettre écrite le 2 janvier 1620 à Louis XIII par Madame de Tarneau, probablement la mère de la victime du 27 mars. Cette lettre d’une veuve désolée montre qu’une sorte de fatalité poursuivait sous Louis XIII comme sous Louis XIV, la famille de Tarneau.
  5. Si Jacques de Fontainemarie crut devoir citer Valère Maxime, le continuateur de la Chronique Bourdeloise cite, de son côté (p. 29) un vers de celui qu’il appelle « le prince des poètes ».