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CHAPITRE I

LES DOXOGRAPHES GRECS


1. Aristote avait pris l’habitude, avant d’exposer sa doctrine sur un sujet donné, de mentionner les opinions émises avant lui et de préparer, par leur critique et leur réfutation, la voie au développement de ses propres théories. Aussi les divers écrits scientifiques du Stagirite nous fournissent-ils nombre de renseignements historiques des plus précieux en raison de leur ancienneté et de la parfaite compétence de leur auteur ; toutefois, il est impossible, en thèse générale, de les accepter sans réserves, car ils sont plus ou moins entachés de polémique, et, d’un autre côté, Aristote les accommode suivant ses propres concepts, ainsi qu’il est naturel, puisqu’il se propose comme but la science, et non son histoire.

L’intérêt que présentaient les divers renseignements ainsi épars dans l’œuvre du Maître, et en même temps leurs lacunes elles-mêmes, pour qui voulait se rendre compte des idées d’autrefois, devaient naturellement faire désirer la composition d’un ouvrage d’ensemble donnant des travaux des anciens physiologues une analyse complète et fidèle. Ce fut une des tâches que s’imposa Théophraste, le plus illustre disciple et le successeur d’Aristote.

L’histoire qu’il écrivit paraît avoir été connue dans l’antiquité sous deux recensions différentes, l’une Des opinions des physiciens (φυσικῶν δοξῶν) en seize livres, l’autre Sur les physiciens (περὶ φυσικῶν) en dix-huit [1]. Peut-être la différence entre le nombre

  1. Diog. Laërce, V, 46 et 48. — On reconnaît aisément que la liste des écrits de Théophraste que donne cet auteur, est une copie de quatre catalogues de collections différentes, classées par ordre alphabétique, mais où entraient, surtout dans les deux dernières, nombre d’ouvrages faussement attribués à Théophraste, s’ils provenaient sans doute d’anciens péripatéticiens. Les